L’histoire des Yvelines s’écrit dans la forêt

NicolasThéodet

Si la forêt façonne aujourd’hui le paysage du département, elle a aussi contribué à écrire son histoire. De la préhistoire à l’ère moderne, les massifs forestiers ont eu un impact majeur sur les Yvelines. 

La carrière de Vossery évoque le passé de la forêt de Méridon ©CD78/N.Duprey

Le Département des Yvelines n’existe que depuis 1964. Pourtant, l’origine de son nom est ancestrale. Il provient du pays d’Iveline qui vient lui-même du latin Silva Aequilina (silva signifie forêt), et dont la première mention écrite date de 768. Dans ce texte, Pépin le Bref, roi de France, fait donation de la forêt aux Abbayes de Saint-Denis et de Saint-Benoît-sur-Loire. De ce vaste territoire forestier, il ne subsiste que le massif de Rambouillet. Il n’est donc pas étonnant de voir les différentes cicatrices de l’histoire en plein cœur de nos forêts.

De la préhistoire à l’ère moderne, l’homme a sans cesse exploité les forêts yvelinoises pour ses besoins. Si dans un premier temps, il se servait de ses ressources, il a fini par y créer des massifs forestiers entiers. C’est le cas de Louis XIV qui planta aux abords de son château de Versailles des milliers de châtaigniers et de chênes pour sa future marine de guerre. De nos jours, ces passages de l’histoire dans nos ENS sont toujours présents. Parfois cachés, ils se dévoilent à ceux qui restent attentifs et qui prennent du plaisir, durant toutes les saisons, à arpenter nos forêts.

Défendre Paris en 14-18 en pleine forêt d’Aigremont

La guerre de 1870 a laissé des traces chez les Parisiens. L’avancée prussienne en terre française a été un véritable traumatisme et poussa, dès 1913, à construire une ceinture de défense de la capitale. Et dès le début de la première guerre mondiale, le général Gallieni mobilise 210 000 hommes aidés par 46 000 civils. Ils aménagent un immense réseau de 350 km de tranchées et fils de fer barbelés. Des centaines d’abris pour l’infanterie, des batteries de quatre à six canons et des dépôts de munitions sont construits. Si une grande partie de ces bâtiments ont été démontés dès 1916, ils en restent encore des traces. Comme dans la forêt des Tailles d’Herbelay. Elles seront matérialisées prochainement par des panneaux informatifs sur le site.

Le Polissoire dans la forêt de Sonchamps

Datant du néolithique, ils sont les traces des premiers sédentaires Yvelinois. ©CD78/N.Théodet

Au détour d’une visite en mars 2019, Jean-Michel Portier, forestier du Département, découvre dans la forêt de Saint-Benoît des blocs de grès. Ces derniers ont servi de polissoirs aux hommes du néolithique. Daté d’environ -5000 avant JC, ils étaient utilisés pour polir les haches de silex.

Fait amusant, « ils maitrisaient l’agriculture et l’élevage. Et donc, ils n’avaient plus besoin de se déplacer pour se nourrir », explique Anne-Lise Sadou, du Service Archéologique Interdépartemental. Nous avons donc, dans le sud Yvelines, des traces des premiers Yvelinois.

La chapelle de Sainte Apolline disparue

Le site est toujours matérialisé pour les promeneurs. ©CD78/N.Duprey

Au XIIIe siècle, en plein cœur de la forêt de Sainte-Apolline, se trouvait le manoir féodal de la Grange-du-Bois. En son centre, une chapelle avait été construite par des moines pour honorer la sainte et ses reliques. En pierre meulière, l’édifice n’a pas traversé les âges. Mais en 1726, il fut totalement détruit. Pourtant, c’est à cet endroit que tous les 9 février était célébrée une messe en l’honneur de la saint patronne des dentistes. Aujourd’hui encore, le lieu se trouve sur l’itinéraire de Saint-Jacques de Compostelle. L’endroit de l’ancienne chapelle est matérialisé par six tilleuls plantés au début du XIXe siècle.  

La carrière des pavés Parisiens à Méridon

Ils n’étaient pas très grand, mais d’une force incroyable. Les ouvriers de la carrière de Vossery sont presque tombés dans l’oubli. Majoritairement d’origine italienne, ils vivaient en autarcie au cœur de la forêt de Méridon durant l’exploitation de la carrière au XIXe siècle. Leur travail, pénible, consistait à en extraire les pierres. Celle-ci, en grès gris et d’une dureté unique, faisait un matériau de choix pour la confection des mythiques pavés parisiens. Aujourd’hui, le site est abandonné. Il laisse apparaître ses sablières et ses dalles de grès pour les promeneurs curieux de la forêt.

Article à retrouver dans le magazine de l'automne (1)