Ruche : à Gambais, un restaurant distingué pour sa démarche écoresponsable et anti-gaspillage

JulietteBENCIVENGO

A Gambais, Cybèle et Frank ont ouvert en 2019 leur second restaurant, Ruche, au Domaine des Bruyères. Ils viennent d’être récompensés par le guide Michelin qui leur a décerné une étoile verte.

Cybèle Idelot et son mari Frank © Virginie Garnier

Cybèle Idelot et son mari Frank © Virginie Garnier

Cybèle et son mari Frank ont ouvert leur seconde table Ruche, au domaine des Bruyères à Gambais où ils ont également des chambres d’hôtes. C’est dans cet ancien relais de poste du XIXe siècle qu’ils ont établi leur domicile, au pied du potager pourvoyeur de fruits et légumes, quelquefois si fécond qu’il permet même d’approvisionner la Table de Cybèle, à Boulogne-Billancourt. Ce potager, Cybèle en rêvait. Il lui était indispensable pour aller au bout de sa démarche, déjà entamée en circuit-courts, du jardin à l’assiette.

Un parcours étonnant

Née à San Francisco, Cybèle commence tôt à aider sa mère en cuisine. Là aussi, il y a un potager, et rien de ce qui s’y produit ne se perd. « Ma mère utilisait plutôt des saumures, elle faisait pas mal de pickles, des choses comme ça, pour conserver ce que donnait notre potager. Elle faisait beaucoup de transformation, j’ai le souvenir d’avoir fait ça avec elle », détaille-t-elle. Autant dire que Cybèle est tombée dans la marmite toute petite. Aussi, après avoir terminé ses études aux Beaux-Arts, c’est tout naturellement qu’elle se dirige vers la cuisine. Elle commence sur l’île de Saint-Barthélemy où elle cuisine pour des propriétaires de villas de luxe, dirige un restaurant dans les Hamptons, se laisse tenter par la pâtisserie à San Francisco puis retourne à New York. Après avoir rencontré son mari en 2006 en France, tous deux finissent par acheter – en 2012 – l’endroit qui deviendra la Table de Cybèle, à Boulogne-Billancourt.

Le circuit-court, un élément non négociable

« Pour les légumes, avec le potager nous sommes quasiment autosuffisants », explique Cybèle. Il faut dire que Cybèle ne travaille – bien évidemment – qu’avec des produits de saison. « Dans la serre en hiver on a des navets, des épinards, du fenouil, des betteraves, différents choux, des brocolis et je pense que c’est tout. Là il faut qu’on termine tout ça parce qu’il va bientôt falloir planter les tomates et les légumes d’été. » C’est une vraie organisation. Pour ce qu’elle ne peut produire elle-même, Cybèle fait appel aux producteurs des alentours. Elle travaille notamment avec la Bergerie nationale lorsque c’est la saison de l’agneau : « j’en ai eu pendant deux semaines mais maintenant il n’y en a plus. La poule de Houdan va arriver, je change la carte en fonction de la saison. J’ai toujours travaillé comme ça. A la Table de Cybèle je change toutes les deux semaines. Au départ c’était toutes les semaines voire tous les jours ! »

La serre où Cybèle et son mari font pousser les légumes © Virginie Garnier

La serre où Cybèle et son mari font pousser les légumes © Virginie Garnier

« Je m’ennuie assez facilement, j’ai toujours besoin d’être stimulée et de créer des choses. Mais c’est aussi plus sympa pour les clients qui viennent régulièrement de ne pas trouver toujours la même carte ! », Cybèle Idelot.

 

L’étoile verte du guide Michelin ? Un coup de projecteur

 Quant à l’étoile verte que Cybèle et son mari Frank viennent de se voir décerner par le guide Michelin pour leur démarche, c’est pour le couple « une reconnaissance qui colle complètement aux valeurs qu’on a toujours eues. Ça met en lumière ces initiatives, et on a vu des gens venir qui sont très sensibles à ça, ça attire une clientèle intéressante ». Car au-delà de la démarche de s’approvisionner en circuit-courts, Cybèle est également une acharnée de l’anti-gaspillage. Dans sa cuisine, rien ne se perd, tout se transforme. Elle travaille des parties des produits habituellement jetées : « je travaille avec les épluchures, les fanes, les verts de poireaux… Avec les fanes je fais un petit pistou ou un coulis de fanes de carottes par exemple. Les feuilles de betteraves on peut les mettre en lacto-fermentation et faire des genres de choucroutes, les verts de poireaux je les déshydrate et les mets en poudre, les épluchures de pommes de terre je fais une glace avec… Je sèche pratiquement toutes les épluchures que j’ai, pour la conservation mais aussi parce que ça concentre le goût. Le scorsonère par exemple qui est de la famille des salsifis, je le fais torréfier et ça donne un goût de café, donc je peux remplacer le café par ça par exemple. » Pour Cybèle, la cuisine est un art à part entière : « pour moi c’est l’art le plus abouti : les gens ingèrent, ça crée des émotions. Il y a un vrai rapport au corps, au cœur, un lien avec la nature et le produit, c’est très riche ! » Pas de doute, Cybèle a bien mérité son étoile verte, elle qui a su ériger l’écoresponsabilité au rang artistique !

Chez Ruche, même le pain est fait maison © Anne-Claire Héraud

Chez Ruche, même le pain est fait maison © Anne-Claire Héraud