Frédéric Chartier, père du Bouillon et maire d’Orgeval

NicolasThéodet

La Villa Chartier, dans la commune d’Orgeval, est un symbole pour la commune. Maison de famille de Frédéric Chartier, fondateur du Bouillon Chartier et maire de la commune, elle est aujourd’hui l’hôtel de ville. Un symbole pour celui qui a dédié une partie de sa vie à la ville yvelinoise. 

La villa se présente face à la ville avec un jardin fleuri. © CD78/N.Theodet

S’il y a bien une chose qui détonne dans la commune d’Orgeval, c’est son hôtel de ville. Au coeur des rues en pierre meulière, et à proximité de son église de village médiévale, la commune située sur les coteaux de la vallée de la Seine possède une pièce architecturale unique au monde. Une villa, aujourd’hui la mairie, transcende les visiteurs par sa brique rouge et sa toiture en ardoise noire. Construite en 1905, elle porta d’abord le nom de villa Chartier, du nom de son commanditaire Frédéric Chartier, maire de la commune et issu d’une lignée d’Orgevalais.

La naissance du Bouillon Chartier

Maire pendant 33 ans, il devient veuf à seulement 28 ans et rejoint son frère Louis-Isidore à Paris. Les deux compères souhaitent faire fortune en ouvrant un restaurant. Ils réalisent leur rêve en 1896 au 7 rue du Faubourg-Montmartre, dans le 9e arrondissement de Paris. Baptisé « Bouillon Chartier », le restaurant connaît un grand succès. Proche des milieux populaires, il accueille l’ouvrier parisien en lui proposant les grands classiques de la cuisine française traditionnelle à un prix bon marché.

Le restaurant Bouillon Chartier est aujourd’hui classé monument historique. © wikimedia

L’idée séduit tellement qu’à l’aube la Première Guerre Mondiale, ce ne sont pas moins d’une vingtaine de « Bouillon » qui rayonnent dans Paris. Devenant le lieu de vie de la belle époque parisienne, artistes, personnalités de l’époque, acteurs, ouvriers se pressent pour déguster le bouillon de pot au feu, plat vedette de la maison.

Un maire visionnaire et généreux pour Orgeval

Ce succès, Frédéric le cumule fièrement avec ses responsabilités d’Orgevalais. Il est en effet élu maire de la ville en 1892. Proposant aux habitants des emplois dans ses différents restaurants, il s’investit pleinement dans le développement de sa commune. Il y fit installer le gaz, l’électricité et l’eau courante. Il bâtit de nombreux lavoirs dans chacun des hameaux, et va jusqu’à payer une partie de ces infrastructures de sa propre poche.

Fils de charron, « dans sa jeunesse, on ne lui aurait pas fait crédit d’un pain de quatre livre », avait déclaré Marcel Cotard, son successeur, dans un hommage publié dans le bulletin municipal, soulignant ainsi sa vie, son esprit d’entreprise, ainsi que « la générosité discrète de M. Chartier ».  Aujourd’hui, les maires d’Orgeval siègent dans cette villa qui domine la vallée et les habitations du bourg. C’est entre ces murs que Frédéric Chartier s’est éteint le 5 avril 1926, à l’âge de 81 ans.

Frédéric Chartier à droite aux côtés de son épouse et de ses beaux-parents. © Revue Histoire d’Orgeval

Un restaurant, symbole de la belle époque

Si le succès des restaurants s’est amoindri avec les générations, celui du Faubourg-Montmartre existe encore aujourd’hui. Sa façade ainsi que l’intérieur du restaurant sont classés au monument historique depuis 1989. Il restera encore comme le symbole de cette France du début du XXème siècle. Fernandel y avait fait allusion dans sa fameuse chanson « Félicie aussi » : « Afin d’séduire la petite chatte. Je l’emmenai dîner chez Chartier. Comme elle est fine et délicate. Elle prit un pied d’cochon grillé ».  Plus récemment, les décors intérieurs de la salle du restaurant ont été utilisés par Jean-Pierre Jeunet pour son film « Un long dimanche de fiançailles ».